Banal ?

Aujourd’hui, être l’enfant de parents séparés est une chose commune, mais ce n’est pas pour autant qu’un enfant fait facilement le deuil de la cellule familiale. On estime qu’il faut un peu plus d’un an à un enfant pour accepter et retrouver ses repères dans la nouvelle organisation familiale, et cela, lorsque la séparation s’est bien passée. c’est-à-dire, lorsque les parents ont continué de dialoguer sereinement de manière à préserver l’intérêt de l’enfant. Pour protéger l’enfant, il faut absolument que les parents communiquent à son propos : sans acrimonie, sans chantage affectif et en évitant absolument de le placer dans un conflit de loyauté ! Il faut que les parents expliquent à l’enfant que s’ils ne s’aiment plus assez pour continuer leur vie ensemble, ils seront cependant toujours ses parents . Le couple n’est plus, mais l’équipe parentale doit absolument continuer à fonctionner. Quitte à se faire aider par un professionnel pour y arriver et protéger l’enfant au maximum.

 

Blessures collatérales

Même si un enfant qui vit dans une situation de conflit et de disputes perpétuelles sera soulagé par la fin de cette violence quotidienne, il faut savoir que cette séparation pourra générer, en lui, comme chez tout enfant de parents qui se séparent, des sentiments difficiles et ambigus. L’incompréhension d’abord, car, même expliqué dans la sérénité par des parents qui s’entendent, le concept : “on ne s’aime plus, mais nous t’aimerons toujours” est un peu difficile à digérer pour un enfant pas encore outillé émotionnellement pour le comprendre. L’angoisse d’être abandonnée ; l’insécurité, puisque les parents doivent poser des choix de vie ; mais aussi la culpabilité : il se sent responsable de la séparation. Culpabilité qui augmente encore lorsqu’il est la raison pour laquelle ses parents se déchirent. Dans les séparations conflictuelles, certains enfants perdent toute spontanéité tant ils ont peur qu’un acte ou un mot de leur part puisse être utilisé par les adultes pour se nuire, d’autres se refusent à exprimer leurs envies par crainte d’envenimer une situation tendue… Et selon les situations, l’enfant peut aussi devenir consolateur, confident ou porte-parole vengeur d’un parent ou ange protecteur de sa fratrie : autant de rôles qu’il ne devrait pas avoir à endosser !

 

Dialogue, toujours fragile

Au moment de la séparation, même quand lorsque celle-cise passe bien, il faut privilégier la discussion, le dialogue et être précis de manière à éviter de créer de possibles conflits : parfois tout se passe bien et puis le quotidien et les sentiments s’en mêlent et un simple retard au moment où on vient chercher / déposer l’enfant, par exemple, peut faire tout exploser. Se rappeler que l’autorité parentale est conjointe – quelque soit le lieu d’hébergement —et le rappeler au Milieu d ‘accueil et à l’école de l’enfant, mettre au point des stratégies ‘facilitantes’ style : quelles décisions doit-on valider ensemble (et donc nécessitent un dialogue) et quelles sont celles que je peux prendre seul puisque nous sommes d’accord. Ce qui n’empêche pas d’avertir l’autre parent. Et puis le respect et la courtoisie doivent mener chaque action, car même si l’équipe parentale veut le bien-être de l’enfant, chacun a, de son côté, le droit de décider de sa vie. Bref, penser à l’autre comme un équipier et le traiter avec le respect que l’on souhaiterait qu’il nous manifeste.

 

L’intérêt de l’enfant

Dans tous les cas, il faut le protéger : même si les parents sont en conflit (autour de lui), il ne doit à aucun moment penser qu’il est responsable. Il peut avoir des choses à exprimer et il doit pouvoir le faire sans pression, sans être coincé dans un conflit de loyauté. Mis à part les situations extrêmes telles que les violences conjugales ou toute autre forme de maltraitance, l’enfant n’a rien à savoir de plus que: «mes parents se séparent.» Le reste – situation, conditions, qui quitte qui, pourquoi… — appartient à la vie privée du couple. Cela ne doit en aucune manière entrer en compte dans le fonctionnement de l’équipe parentale. L’enfant n’a pas à être mis au courant et encore moins par un parent éploré et en colère qui va forcément tenter de le gagner à sa cause. De la même manière, l’enjeu est l’intérêt de l’enfant, mais trop souvent, l’enfant devient lui-même un enjeu : l’obtention de sa garde par l’un devenant une manière de punir l’autre… Bien sûr lorsque la colère est au cœur d’une relation, il est difficile de ne pas la laisser contaminer le reste des interactions, voilà pourquoi on conseille vivement aux parents dans cette situation de se faire aider.

Antoine BORIGHEM, Gestionnaire de projet à la cellule soutien à la parentalité ONE
Quelle est l’importance de prendre en compte l’intérêt de l’enfant ?
Emmanuel DE BECKER, Pédopsychiatre Cliniques Saint-Luc Bruxelles
En quoi une séparation impacte la vie de l’enfant ?
Etienne DE MAERE, Référent maltraitance ONE service SOS enfant Province de Namur
Qu’est-ce qu’une séparation « conflictuelle » ? Comment savoir quand on a besoin d’aide pour s’accorder autour du bien être de l’enfant ?
Emmanuel DE BECKER, Pédopsychiatre Cliniques Saint-Luc Bruxelles
En quoi le conflit en cas de sépration impacte -t’il encore davantage la vie de l’enfant ?
Etienne DE MAERE, Référent maltraitance ONE service SOS enfant Province de Namur
Comment protéger l’enfant ?
Des solutions ?

Casques bleus

Différents organismes peuvent intervenir et aider les parents et les enfants dans le cas d’une séparation conflictuelle : PMS, planning familial, le tribunal de la famille, les maisons de justice, les équipes SOS enfants… Les Travailleurs Médico-Sociaux (TMS) de l’ONE peuvent renseigner les parents en train de vivre cette situation et leur proposer des pistes pour sortir du conflit parental (et accessoirement du conflit de couple), mais ce dernier peut perdurer indépendamment d’une décision autour de l’éducation et de la garde de l’enfant…

 

Un moyen parmi d’autres

Quand ça coince, avant, pendant ou même après la séparation, les parents ont tout à gagner à se faire aider par un tiers. La médiation est un bon moyen, mais elle nécessite la collaboration active des deux parents. Sinon, il faudra en passer par la justice qui imposera les modalités, entre autres, en matière d’hébergement dans le respect des droits de l’enfant… mais ceci sans forcément résoudre la crise, ce qui peut au final générer des situations très douloureuses pour l’enfant.
La médiation est une démarche volontaire entre deux parents qui ne parviennent plus à communiquer. Personne ne peut obliger son ancien partenaire à participer à une médiation, mais le médiateur peut expliquer au parent réticent que cela ne l’engage à rien d’essayer. C’est un espace où les deux parties peuvent dire leur désaccord et apprendre à l’exprimer différemment. Son but n’est pas de réconcilier les parents, ni de les mettre d’accord, mais bien de les amener à renouer le dialogue de façon à pouvoir prendre ensemble des décisions pour le bien de l’enfant et de se fixer des règles très concrètes afin de devoir discuter le moins possible et ainsi minimiser les possibilités de disputes ou de conflits. Les parents sont amenés à travailler ensemble et à se définir un cadre qui va leur permettre de continuer d’agir pour le bien de l’enfant sans avoir à se confronter l’un à l’autre. Les décisions sont très concrètes : horaires, responsabilités pensions alimentaires… Le médiateur n’élude aucun point qui fâche et plus le cadre est précis, mieux cela se passe. À la fin de la médiation, l’accord signé par les parents est contraignant et vaut décision de justice.

 

Un lieu où renouer

Parfois, lors de conflits particulièrement violents ou de circonstances particulières, l’enfant est confié à la garde exclusive d’un seul parent (sur décision de justice). La Convention Internationale des Droits de l’Enfant stipule cependant que : ‘Les États parties respectent le droit de l’enfant séparé de ses parents ou de l’un d’eux d’entretenir des relations personnelles et des contacts directs avec ses deux parents, sauf si cela est contraire à l’intérêt supérieur de l’enfant’. Des lieux existent dans ce cas pour permettre la rencontre avec le parent qui s’est vu refuser la garde. Ce sont les « Espace-Rencontre » : un service d’accompagnement de l’exercice du droit aux relations personnelles, lorsque celui-ci est interrompu, difficile ou conflictuel. Concrètement, cela permet à l’enfant de maintenir, de reprendre ou de créer une relation avec le parent / le proche, avec lequel il ne vit pas et ainsi de se situer dans son histoire et ses origines. Ce sont des cadres neutres et sereins visant, par le biais d’un accompagnement et d’un encadrement, au soutien de la relation parent/enfant. Le terme ‘parent’ s’entend ici au sens large : père, mère, grands-parents et toute personne pouvant prétendre à un droit aux relations personnelles. L’accompagnement est assuré par des professionnels qualifiés, ayant une formation spécifique dans le champ social et relationnel : psychologue, assistant en psychologie, conseiller conjugal, avocat, juriste, licencié en science de la famille, médiateur familial, etc.

 

Un exemple

Le Patio est un « Espace-Rencontre » agréé par la Fédération Wallonie-Bruxelles. Gratuit, subsidié par les pouvoirs publics, le Patio vise le maintien, la prise ou la reprise de relation entre l’enfant et le parent avec lequel il ne vit pas. C’est un lieu de transition pour reconstruire dans la confiance et faire évoluer une relation afin qu’elle puisse à l’avenir se faire sans intermédiaire.. Le Patio est ouvert aux personnes venant sur décision judiciaire, administrative ou suite à un accord écrit, signé par les parties et cosigné par un tiers (avocats, médiateurs) et ce dans le respect du fonctionnement du Patio.

 

 

Merci à toutes les personnes qui ont contribué à cette réalisation.
Catherine LAURENT, Travailleuse médico-sociale ONE
Quel est le rôle de la TMS lorsque les parents se séparent ?
Etienne DE MAERE, Référent maltraitance ONE service SOS enfant Province de Namur
Qu’est-ce-que la médiation familiale ?
Caroline COLLARD, Coordinatrice générale et clinique du Patio
Espace rencontre agréé par la Fedération wallonie Bruxelles, que permet le Patio ?
Documentation sur le sujet